L’actualité est intéressante si on veut bien établir entre les informations décousues, présentées en vrac, des liens qui viennent jeter un trouble dans notre esprit.
Et voilà qu’on reparle de l’Affaire Vincent Lambert. Loin de moi l’idée d’avoir une opinion sur une réalité aussi dramatique. Je ne retiendrai que le dernier rebondissement. La cour d’appel de Paris attend de connaitre l’opinion des 15 experts de l’ONU pouvant se prononcer sur le « fonds », experts désignées par le Comité international des droits des personnes handicapées (CDPH), à la suite d’une saisine de trois mois.
Tiens, tiens, mais cela nous dit quelque chose. C’est une inspection de cette instance qui exige de la France la fin des institutions (toutes mauvaises) pour les personnes handicapées (voir article précédent). La France ne semble pas s’opposer du tout à cette demande au nom de l’idéologie de l’inclusion (sans doute par souci économique). Par contre, dans le cas précédent, E. Macron écrit que les préconisations du CDCPH sont « dépourvues de caractère contraignant ». C’est donc en même temps vrai et faux. Quelle horreur !
Les parents de V. Lambert et leurs avocats demandent le changement d’établissement et le transfert dans un établissement pour personnes handicapées. On attend avec un suspense insoutenable que l’ONU nous dise comment on fait si on a fermé les établissements et si on estime que ceux-ci ne sont plus nécessaires.
Evidemment, on marche sur la tête. M. Onfray vient de faire paraître un livre sur la théorie des nouvelles dictatures et illustre comment on décervelle les gens dans cette société que certains appellent le progressisme. On crée la confusion pour dégoûter les gens de rechercher par eux-mêmes la vérité qui aide à se construire… si c’est ça le progrès…
Dans un article du Nouvel observateur, le journaliste revient sur l’institut Moussaron qui accueille des enfants handicapés entre 3 et 20 ans. C’était il y a trois ans, un haut lieu de la maltraitance et Marie-Arlette Carlotti en avait fait son cheval de bataille et déposé une plainte au nom de l’Etat.
L’article du Nouvel observateur nous apprend que cette affaire se termine par un non-lieu généralisé. L’exact contraire de ce qu’avait dit la secrétaire d’Etat, avec l’aide des services de l’Etat et les multiples rapports.
Là on voit à quel point les services de l’Etat sont incapables (mais totalement incapables) de suivre les établissements, de les accompagner, de faire des contrôles réguliers, de donner les moyens financiers etc. car s’il n’y a pas eu volonté de maltraitance (au sens juridique – à voir d’ailleurs), il y a bien eu des négligences graves pour partie responsables de nombreux décès. C’est ce que nous disons depuis des années. Il faut faire appliquer les recommandations de bonnes pratiques et parfois tout simplement les circulaires et les décrets.
Aujourd’hui depuis qu’on a décidé de ne plus créer de places nouvelles, on n’essaie même plus de bien faire fonctionner ce qui existe. Quel cynisme ! Quel abandon d’un des rôles essentiels d’un état de droit.
Quel mépris pour les personnes accueillies et les familles qui assistent à cette dégradation et pour le salariés qui soit ne voient plus les dysfonctionnements, soit rejettent les responsabilités sur les problèmes de comportement des personnes handicapées.
La dernière information laisse entrevoir des possibilités d’un avenir moins sombre. Il s’agit d’un jugement prononcé par le Tribunal administratif de Toulouse condamnant l’Etat à payer 35 000 € à un enfant autiste et à sa mère pour carence de prise en charge. Celui-ci en effet était accueilli à mi-temps en IME au lieu d’un plein-temps décidé par la CDAPH…
Evidemment, si on ne crée pas de places, ce sont des centaines, et même des milliers d’enfants ou d’adolescents qui se retrouveront sans solution.
Or l’Etat, pour des raisons idéologiques et financières, ne veut plus créer des places nouvelles… Il serait peut-être temps de faire preuve d’un minimum de bon sens pour sortir de l’impasse.
Et dire qu’il paraît que presque tous les députés de la LREM ont un bac + 5 ou plus. C’est l’élite qui nous gouverne, paraît-il. On a du mal à y croire. C’est vrai que ça coûte un peu et que c’est un « pognon de dingue » dixit le Chef de l’Etat.
Allez, il faut se réveiller et regarder dans les yeux ceux qui nous gouvernent et pour qui il n’y a plus de vérité… que celle que, dans l’instant, on proclame comme telle. C’est sûr avec le même aplomb et la même suffisance, demain, on dira le contraire.
Prenons encore un autre exemple de ces contradictions qui semblent être devenues une généralité.
Sur la voie de la désinstitutionalisation qui à nos yeux est une démarche intellectuelle (et non pas un diktat de l’ONU qui nie la réalité des besoins), il faut réfléchir au bon fonctionnement des toute petites structures qui constitueront pour les adultes le chez-soi des personnes handicapées : cela correspond par exemple au droit au logement, au droit de visite, mais aussi aux sorties. Toutes ces problématiques sont évoquées d’ailleurs dans les recommandations de bonnes pratiques professionnelles.
Depuis de nombreuses années (car le gouvernement n’a rien inventé), certaines associations ont sollicité les règles communes du droit au logement : obtention de prêts conditionnés par des APL : la personne handicapées est chez elle, comme n’importe quel locataire, elle ne peut être expulsées, personne ne peut sous-louer son studio, etc.
Mais, tout en ayant soutenu ce type de projets dans les appels à projet, les ARS et les conseils départementaux voudraient (pour arriver à un taux d’activité de 100 %) exiger des petits établissements qu’ils accueillent en stage de jeunes adultes sans solution sur les places libres en internat (faisant fi d’ailleurs des règles d’attribution des APL). C’est complètement contradictoire. Cette réponse administrative (les accueils des stagiaires), vieille de 30 ans, n’est pas adaptée d’une part aux personnes avec autisme (pour qui tout changement est une épreuve) mais également est en contradiction avec l’esprit des projets innovants. Mais qui s’en inquiète ? On peut effectivement dire une autre chose et faire l’exact contraire.
Quelle tristesse et quel monde prépare-t-on ?
Marcel HERAULT
3 juillet 2019
N. B. :